C'est un fait, le risque nucléaire et radiologique soulève beaucoup d'inquiétudes. Trouver de l'information pertinente sur les attitudes à adopter n'est pas si facile. Du coté des autorités, les conseils donnés peuvent parfois laisser sur leur faim les personnes souhaitant se préparer, et du côté des survivalistes, il faut bien reconnaître qu'on entend parfois tout et n'importe quoi. Partant de ce constat j'ai décidé de demander directement à des professionnels de la radioprotection sur le Forum technique de RadioProtection Cirkus leur avis sur la meilleure façon de se protéger face à divers risques radiologiques.

Voici une synthèse des réponses obtenues. Un grand merci à tous les intervenants du RPcirkus pour avoir pris le temps de répondre à mes questions :) Si jamais vous souhaitez en apprendre d'avantage sur la radioactivité et les instruments de mesure n'hésitez pas à vous inscrire sur leur forum, qui est une mine d'information !

J'arrive sur les lieux d'un accident de la route, et un paquet arborant le symbole radioactif gît au sol. Ou bien je découvre un tel paquet par hasard dans d'autres circonstances. Quelle conduite adopter ?

"J'appelle les pompiers ou la gendarmerie comme pour un accident "normal", je préviens qu'il y a ce type de paquet sur la route (...) et s'il faut sauver le bonhomme, j'aurai tendance a y aller aussi, les emballages sont sensés résister a un accident".

"Informer les services de secours (112) en leur précisant le caractère "radioactif" du colis et préciser si celui-ci, de visu, est intègre. Si connaissance du numéro d'urgence radiologique, composition de celui-ci (0 800 804 135)".

"Je rajouterais qu'après avoir secouru les éventuels victimes, appelé les secours et leur avoir signalé le colis, j'éviterais de rester juste à coté du colis en m'éloignant de plusieurs mètres."

Un incendie se déclare dans un centre de radiologie à proximité de mon domicile ou de mon lieu de travail. Dois-je craindre une contamination radioactive ?

"S'il s'agit bien d'un service de radiologie, aucune contamination radioactive n'est possible puisqu'un tel service ne peut détenir (et donc encore moins manipuler) de radionucléide : on ne trouve que des générateurs électriques émetteurs de rayonnements X. Par contre, s'il s'agit d'un service de médecine nucléaire ou d'un centre de radiothérapie pratiquant de la curie thérapie, là, en cas d'incendie, il peut effectivement avoir dissémination de radionucléides via les fumées et gaz de combustion..."

"Si c'est un centre de radiologie aucun risque. comme dis par les autres, ce sont des accélérateurs d'électron avec un bouton ON/OFF."

Une "bombe sale" explose à proximité. Je ne suis pas blessé, mais pourrait avoir été contaminé. Quelle conduite adopter pour me décontaminer le mieux possible ?

"Prendre une douche, et suivre les consignes des services de secours. Mais comment faire pour savoir que c'est une bombe sale ?"

"Etre pris en charge par les services de secours compétents, autrement dit rester sur place..."

"Appeler les secours, me signaler auprès d'eux en restant sur place et attendre leurs consignes."

"Prendre une douche pour ce qui est corporel, boire de l'eau pour l'interne. "

"Pour la douche: il faut la prendre tiède. Pas froide pour ne pas fermer les pores et pas chaude pour ne pas les ouvrir. Se savonner doucement. La peau sans lésion offre une protection naturelle très efficace contre la contamination. Si on crée une lésion en récurant la peau, la contamination pourra rentrer".

Un accident majeur a lieu dans une installation nucléaire à proximité. Faut-il favoriser l'éloignement le plus rapide possible, ou le confinement ?

"Confinement et écoute des services compétents qui ne manqueront pas d'avertir les populations. L'évacuation risque plus d'engorger les routes, bloquant l'arrivée des services de secours, et créer une situation a la Walking Dead : tout le monde panique, y a des accidents, et le bordel engendré est pire que l'accident en lui-même... Donc il faut écouter la radio/la télé, ne pas engorger les réseaux mobiles, et rester calme".

Un certain nombre de personnes soucieuses de se préparer à un accident nucléaire acquièrent par leurs propres moyens des pastilles d'iodure de potassium. Quels sont les dangers d'une automédication en la matière ? Les bénéfices restent-ils selon vous supérieurs aux risques ?

"Alors la pastille d'iode qu'on soit bien d'accord protège uniquement d'un accident avec rejet d'iode massif (Tchernobyl , Fukushima) et durant un temps limité. Sur les effets, c'est simple : tu satures ta thyroïde. Donc si tu le fait trop souvent, en trop grande quantité vu que l'iode est un antiseptique tu vas dans un premier temps détruire toute ta flore de ton corps avec tous les effets indésirables (diarrhée, nausée, sensibilité accru aux blessures), dans un second temps si tu continue encore à en prendre une tous les matins au petit déjeuné problèmes urinaires, allergies, des résistances du corps humains aux traitements médicaux, puis blocages des reins donc mort. Conclusion, il y a beaucoup plus de risque à se faire son automédication en prenant sa gélule à chaque fois que l'on entend nucléaire qu’éventuellement un jour funeste la prendre 1 heures plus tard sous conseil des autorités, car si tu es bien resté confiné chez toi, comme dit précédemment tu n'aura couru quasiment aucun risque."

"Même en cas d'accident nucléaire il faut écouter une radio nationale pour connaitre le moment où ingérer l'iode. Si l'on en prend avant, lorsque le nuage arrive au-dessus de nous il est possible que notre thyroïde ne soit plus saturée. Mais dans la grande majorité des cas, si il y a un accident nucléaire il n'y aura pas de rejet dans l'atmosphère. "

Quels matériels de protection et de détection conseilleriez-vous aux personnes souhaitant se préparer sérieusement à un accident nucléaire / radiologique ? Masques à gaz et combinaisons étanches constituent-ils de bonnes protections ?

"Une séance chez le psy. Parce que dans ce cas il doivent aussi se soucier des chutes d'avion, des accidents de voitures, des piqures de requins et morsures d'abeille, chute de noix de coco, etc... Plus sérieusement, hormis dans une zone sérieusement touchée, un masque papier sera largement suffisant. "

"La première chose si on parle bien d'un incident type Tchernobyl , Fukushima, c'est le confinement dans des bâtiments fermés, le temps que le panache passe. Car le premier danger dans ce cas là, c'est l'irradiation. Rester donc écouter les consignes des autorités. Ensuite pour la contamination, les masques et combinaison sont bien dans un premier temps mais ils sont difficiles à porter plusieurs heures, se pose la question du déshabillage, si tu ne le fait pas correctement ba ça n'aura servit à rien de les mettre... Si en plus tu rajoutes qu'une cartouche filtrante n'a une durée de vie que de 5 ans si elle est bien resté fermée dur dur..."

Je pense avoir été contaminé (en interne) par des radio-éléments. Au delà des traitements médicaux, existe-t-il des pratiques pouvant être mises en oeuvre par tout un chacun pour éliminer au moins en partie ces radio-éléments par les voies naturelles ?

"Boire de l'eau. Le corps est une chouette machine et va se charger tout seul d'éliminer en partie la contamination. Et l'interprétation personnelle d'un hypocondriaque n'est pas bonne conseillère. Contacter l'ASN ou l'IRSN sera la meilleure chose à faire dans ce cas."

"Les radionucléides (RN) incorporés sont éliminés si la période effective le permet, par voies naturelles (urine - sueur / selles). On peut limiter l'incorporation du RN par lavage des fosses nasales, bain de bouche voir laxatif (si ingestion), accélérer son élimination dans certain cas comme en augmentant la diurèse pour les RN qui se fixent dans le corps entier tel le 3H, ou empêcher la fixation du RN sur son organe cible en utilisant des chélateurs, mais là on est dans le domaine de l'acte médical.... Tout va dépendre de la nature du RN ainsi que du mode d'incorporation. Si vous avez un radionucléide qui a une période biologique et une période radiologique longues (et donc une période effective longue) tel le Plutonium, et que celui-ci s'est fixé sur son organe cible (principalement les os), vous aurez beaucoup de mal à l'évacuer..."

"En plus de ce qu'on dit les gens (...) la sudation ! Boire de l'eau c'est bien, suer en buvant de l'eau c'est encore mieux !"

L'imaginaire collectif décrit souvent les accidents nucléaires majeurs comme étant de nature apocalyptique. Pourtant des gens vivent à Hiroshima et Nagasaki, et toute vie n'a pas disparu à Tchernobyl ou à Fukushima. Ces zones ne sont donc pas définitivement condamnées. A-t-on une idée de la durée de vie d'une zone d'exclusion mise en place suite à un accident nucléaire ?

"Les zones ne sont pas condamnées. Certes, il y a un sérieux problème de contamination. Néanmoins, la nature reprend toujours ses droits et ce n'est pas parce que l'homme ne peut plus y habiter que c'est un problème pour d'autres espèces. Pour Tchernobyl, la zone d'exclusion va le rester encore un sacré moment. Parce qu'il y a toujours des traces de contamination et ce sera le cas un bon moment encore. Apres, des gens y vivent, c'est vrai. Essayez d'aller expliquer a une personne de 70 ans que dans 20 ans elle aura un cancer. Les pseudo-reportages interviewant ces personnes (souvent les mêmes d'ailleurs) ne prennent pas ce fait la en compte et se contentent de dire que malgré les risques les gens restent dans la zone. Cela concerne une poignée d'individus, trop vieux pour avoir des enfants, trop vieux pour être inquiet des effets stochastiques, trop vieux pour qu'on leur demande de quitter l'endroit ou ils ont vécu toute leur vie. Apres, concernant Tchernobyl, la question intéressante serait de savoir pourquoi il n'y a pas cette zone d'exclusion en Bielorussie. Un autre fait sympa a savoir : autours de Tchernobyl, il n'y a plus d'activités humaines. Donc les bestioles s'en donnent a coeur joie pour se reproduire et vivre en paix. Je n'y ai pas rencontre de cheval a 5 pattes, de sanglier disproportionné ou de loup faisant copain-copain avec un lapin."

"Au pif je dirai 300 ans, 10 fois la période du 137Cs."